Les effets cumulatifs du travail à distance et de l’enseignement à domicile mêlés à ceux de l’incertitude ont donné lieu à une flambée du nombre de cas d’épuisement dès le début de la pandémie. Un sondage mené en mai 2020 par Korn Ferry auprès de 7 000 employés basés aux États-Unis a révélé qu’un pourcentage stupéfiant de 73 % des professionnels se sentaient déjà épuisé (en anglais uniquement). À mesure que la pandémie perdure, le problème se complexifie davantage.
Soyons clairs, la pandémie n’est pas entièrement responsable du problème d’épuisement professionnel que l’on constate actuellement. Dans certaines professions, y compris dans le secteur de la médecine clinique, plus de 50 % des professionnels ont déclaré être épuisés avant même l’apparition de la COVID-19 (en anglais uniquement). Pourtant, il est prouvé que la pandémie a exacerbé le phénomène, surtout chez les travailleurs de la santé de première ligne. Il est également prouvé que certains groupes démographiques souffrent plus que d’autres. Les personnes soignantes non rémunérées, dont un nombre disproportionné de femmes, sont particulièrement à risque.
Si elles ne règlent pas le problème, les organisations paieront cher dès maintenant et pour les années à venir. Avant la pandémie, l’Organisation mondiale de la Santé estimait que pas moins de 615 millions de personnes aux quatre coins du monde souffraient de dépression et d’anxiété pour un coût estimé à 1 billion de dollars en perte de productivité annuelle.
Heureusement, nous n’avons pas à rester là à ne rien faire et à laisser les effets de l’épuisement professionnel suivre leur cours. L’épuisement professionnel est presque toujours évitable si l’on effectue les bonnes interventions.
L’épuisement professionnel n’est pas seulement une façon familière de décrire comment nous nous sentons lorsque notre travail commence à épuiser notre énergie ou à mettre en péril notre bien-être. D’après la définition de l’Organisation mondiale de la Santé, l’épuisement professionnel est un type de « stress chronique au travail qui n’a pas été correctement géré ». Selon l’OMS, l’épuisement professionnel se manifeste à trois niveaux :
L’épuisement professionnel est souvent considéré comme un problème de santé mentale, mais ses effets se font sentir tant sur le plan mental que physique. Comme l’indique une étude publiée en 2018 dans la revue Open Medicine (en anglais uniquement), l’épuisement professionnel n’est pas seulement associé au stress et à la dépression. Il est également lié à « des obstacles physiques à la santé notamment les douleurs musculaires, les maux de tête, l’insomnie, les maladies respiratoires et les troubles gastro-intestinaux ». Pour cette raison, l’épuisement professionnel coûte cher aux organisations. Ces dernières paient en perte de productivité. Et lorsque les employés partent, elles paient en outre la facture du recrutement et de la socialisation organisationnelle.
En tant que gestionnaire, prendre soin de votre équipe est toujours une priorité, mais le passage au télétravail ne fait que compliquer les choses. Les données disponibles pour prendre des décisions éclairées sont moins nombreuses, tandis que le nombre de variables ayant une incidence sur le rendement des membres de notre équipe augmente. Cela ne signifie pas que la tâche est impossible, car il existe des façons proactives de soutenir votre équipe et d’atténuer le risque d’épuisement professionnel.
Commencez par enfiler votre propre masque à oxygène avant d’aider les autres. Prendre soin de vous est la meilleure façon de bien vous positionner pour soutenir les autres. De plus, le fait de joindre le geste à la parole enverra un message clair sur ce à quoi ressemble le ressourcement personnel. Pour commencer, établissez des limites claires pour la journée de travail. Même si vous voulez être accessible aux membres de votre équipe 24 heures sur 24, 7 jours sur 7, ou que vous supposez que vous devez l’être, ce n’est peut-être pas dans votre meilleur intérêt ni dans le leur. Engagez-vous à être accessible tout en protégeant votre temps de repos, de récupération et de recharge.
La plupart des gens ne se rendent pas compte du rôle que joue leur cadre de vie et de travail. Toutefois, il est amplement prouvé que travailler dans un espace propre, désencombré et bien éclairé joue un rôle considérable dans notre façon de travailler et notre ressenti à l’égard de notre travail. Avant l’apparition de la pandémie, cela avait amené de nombreuses organisations à consacrer des millions de dollars à l’esthétique du lieu de travail.
Depuis que la pandémie fait rage, l’attrait du lieu de travail est devenu une considération secondaire. Mais il n’est pas nécessaire qu’il en soit ainsi. En tant que gestionnaire, vous ne pouvez pas dicter la façon dont les travailleurs à distance installent leur bureau à domicile. Vous pouvez néanmoins suggérer des façons de tirer le meilleur parti des espaces les plus exigus. Certaines entreprises sont même allées plus loin en permettant à leurs travailleurs d’amener chez eux du matériel et des meubles.
Faites sans cesse la promotion de liens authentiques et rappelez-vous que la vidéoconférence n’est pas la seule façon de nouer des liens avec les autres ! Par exemple, essayez de passer un appel à un seul membre de votre équipe pendant que vous marchez. Un rythme, un contexte et des modes de communication différents permettront d’ouvrir de nouvelles possibilités d’établir des relations.
Faites le point régulièrement. Il n’est pas nécessaire de demander aux membres de votre équipe s’ils se sentent épuisés. Peu d’employés l’admettront. Soyez plutôt concret. Demandez-leur s’ils se sentent toujours liés aux autres et demandez sur quels aspects et de quelle façon ils influent le plus. Si vous travaillez dans une organisation où les relations managériales sont protocolaires, essayez plutôt de mettre en place des « prises de pouls entre pairs ».
Comme l’a souligné une étude récemment publiée sur la prévention de l’épuisement professionnel, les meilleurs programmes de prévention de l’épuisement professionnel ne visent pas seulement à modifier notre façon de travailler. Ils mettent également l’accent sur notre mode de vie. Comme le concluent les auteurs de l’étude, « les programmes de prévention de l’épuisement professionnel peuvent être plus efficaces s’ils mettent l’accent non seulement sur les mesures prises par l’employeur en milieu de travail, mais aussi sur celles prises par les employés ainsi que sur les facteurs extérieurs au domaine de travail ».
À cette fin, encouragez également les membres de votre équipe à continuer de renouveler leur liste de choses agréables à faire pendant leurs congés. Si vous avez déjà une relation ouverte et simple avec les membres de votre équipe, encouragez-les à partager des idées et des photos de ce qu’ils font en dehors du travail. Par ailleurs, si certains ont des enfants, partagez des idées sur les pratiques exemplaires visant à appuyer les plans de scolarisation à distance. Considérez votre équipe comme une ressource qui peut non seulement appuyer votre travail, mais aussi votre capacité d’épanouissement à l’extérieur du lieu de travail.
Un « travail de forçat » prolongé peut sembler la meilleure façon de venir à bout du travail, mais ce n’est pas toujours le cas. Encouragez votre équipe à piquer de courts sprints de travail. Ce faisant, vous accélérerez la mise en œuvre des projets, mais n’oubliez pas que constater les résultats est le meilleur moyen d’accroître l’efficacité professionnelle. Passer d’une période de travail intense à une période de repos est également la meilleure façon de stimuler le flux de travail.
Il ne fait aucun doute que certains travailleurs de certains secteurs s’épanouissent, mais dans d’autres, l’épuisement professionnel est à la hausse. À mesure que la pandémie persistera, l’épuisement professionnel devrait aussi devenir un problème croissant, surtout pour les travailleurs qui doivent assumer le double fardeau de la prestation des soins à domicile non rémunérée et du travail à distance.
Les recherches existantes laissent entendre que les interventions en matière de prévention de l’épuisement professionnel peuvent avoir un effet considérable sur l’amélioration des résultats des employés, mais émettent une mise en garde : les effets de ces initiatives ne sont souvent ressentis qu’à court terme. Si l’on se sert des recherches existantes portant sur l’épuisement professionnel comme principe directeur, le message est clair : les initiatives de prévention de l’épuisement en milieu de travail peuvent avoir et ont effectivement des effets, mais pour être pleinement efficaces, ces mesures de prévention doivent être mises en œuvre de façon continue.
Dre Camille Preston, Psychologue des affaires et experte en leadership, Dre Camille Preston a fondé AIM Leadership en 2004 avec l’idée d’appliquer les principes fondamentaux de la psychologie dans le but de soutenir les équipes de gestions dans des environnements commerciaux à forte croissance et à forte pression. Camille est une pionnière de la psychologie des affaires. À l’avant-garde de l’application de nouvelles approches individuelles et systémiques, elle aide les PDG et leurs équipes à relever les défis dans des milieux de travail perturbés et complexes. En travaillant avec Camille, les clients apprennent à définir efficacement les priorités, à modifier leurs comportements afin d’accroître leur influence et à optimiser les systèmes holistiques (individu + équipe + organisation) pour obtenir des résultats. Plus important encore, Camille aide les clients à creuser en profondeur afin d’identifier et de résoudre les causes sous-jacentes qui freinent leur réussite.