« Les alliés s’efforcent de mettre fin à des systèmes d’oppression qui ne sont généralement pas considérés comme ciblant leur propre identité. » Tal Peretz
Partout en Amérique du Nord, nous ressentons sans cesse le travail extraordinaire qu’effectuent les mouvements de justice raciale (par exemple Black Lives Matter) et écoutons leurs appels collectifs à l’action sur les questions relatives à l’injustice raciale, à l’exclusion et à la discrimination systémique. Dans certains milieux de travail, les appels à l’action ont amené les employeurs et les employés à participer à des cercles d’écoute et à des forums virtuels. Dans ces espaces, des membres des communautés autochtones, noires et d’origine africaine, et sous-représentées, citent des exemples douloureux de leurs expériences vécues avec le racisme, le racisme contre les Noirs, les traumatismes et la résilience.
En réponse aux appels à l’action et à l’impact sur le plan affectif des récits personnels rapportés par les collègues et les membres de la collectivité, de nombreuses organisations et personnes ont publié des déclarations pour attirer l’attention sur leur engagement envers l’alliance inclusive. Par exemple, voici ce qu’on peut lire sur le site Web de Lululemon Athletica :
« Notre P.D.G. Calvin McDonald et notre équipe de direction ont pris les engagements suivants pour passer à l’action et financer l’Inclusion, la Diversité, l’Équité et l’Action au sein de notre entreprise. Cela nous permet de rester actifs et d’agir de façon solidaire dans notre engagement contre le racisme. Il ne s’agit aucunement d’une finalité. Ce n’est que le début. » (Lululemon Athletica Inc., 2020, version française.)
Étant donné qu’un nombre croissant de sociétés et d’organismes sans but lucratif encouragent leurs employés à agir en partant d’une alliance inclusive, il est essentiel de bien comprendre à quoi se réfère l’alliance inclusive, et d’obtenir quelques conseils pour développer une pratique de l’alliance inclusive.
Le terme d’alliance inclusive évolue, et les définitions varient selon les organisations et les groupes qui l’utilisent. L’expression a gagné en popularité au milieu des années 2000 grâce à la croissance et à l’intégration des campagnes Espaces positifs (en anglais uniquement) dans les organismes de défense des droits des LGBTQI2 au Canada et aux États-Unis, dans les établissements d’enseignement et dans certaines entreprises.
La Fédération des enseignantes et des enseignants de la Colombie-Britannique définit l’alliance inclusive comme une pratique active, cohérente et ardue de désapprentissage et de réévaluation dans le cadre de laquelle une personne privilégiée cherche à agir en solidarité avec un groupe de personnes marginalisées. Elle fait remarquer que l’alliance inclusive ne définit pas une identité et n’est pas personnalisée, et souligne qu’il s’agit d’un processus de toute une vie axé sur l’établissement de relations interpersonnelles fondées sur la confiance, la cohérence et la responsabilisation avec des personnes ou des groupes marginalisés.
Au cours de l’élaboration d’un processus d’alliance inclusive, le travail et les efforts d’une personne doivent être reconnus par la personne et les communautés avec lesquelles elle cherche à s’allier pour lutter contre l’injustice raciale et créer des milieux de travail inclusifs.
Un allié est une personne qui appartient à un ou plusieurs groupes d’identité sociale privilégiés qui détiennent du pouvoir dans la société dominante. Cet allié soutient les membres de groupes marginalisés ou sous-représentés et prend des mesures pour perturber les actes de discrimination.
Lors d’entrevues avec les médias et au cours de séances de formation, on me demande souvent de faire part de mes opinions professionnelles sur l’alliance inclusive. Tout d’abord, il est utile d’examiner certaines mesures qui ne sont pas considérées comme des mesures d’alliance inclusive.
Les employés s’efforceant d’être reconnus comme des alliés doivent savoir que l’alliance inclusive ne consiste pas à :
La prochaine étape consiste à réfléchir à ce qu’il faut faire pour développer une pratique d’alliance inclusive. Au fil des ans, je me suis rendu compte que l’alliance inclusive est un vaste processus qui exige ce qui suit :
En me fondant sur des décennies de conversations avec les clients, sur les commentaires des participants à des activités d’apprentissage et de perfectionnement, et sur la recherche, je propose une liste de conseils que les employés devraient prendre en compte lorsqu’ils élaborent leur pratique d’alliance inclusive. Je qualifie cette pratique d’alliance inclusive intentionnelle pour reconnaître et souligner à quel point il est essentiel que les alliés agissent avec résolution et de façon intentionnelle.
Pour bâtir des milieux de travail où l’on encourage activement l’alliance inclusive, les organisations peuvent offrir diverses occasions d’apprentissage et de perfectionnement. Ces occasions devraient être dirigées par des animateurs qualifiés qui ont vécu directement une expérience de racisme, d’exclusion et de discrimination et qui appartiennent à une communauté noire, autochtone, racialisée ou sous-représentée.
Les employeurs peuvent également collaborer avec leurs employés pour élaborer des plans d’alliance inclusive encadrés par les lois sur les droits de la personne et par les politiques internes du milieu de travail régissant la conduite des employés, et énoncer clairement les attentes. Ces plans peuvent être intégrés aux stratégies d’EDI existantes.
En guise de conclusion amicale, je rappelle que l’alliance inclusive exige des investissements continus sur le plan tant des ressources, du dialogue et du soutien que de la force émotionnelle. Il s’agit d’un processus qui demande à celles et ceux qui souhaitent être des alliés intentionnels d’être présents, de rendre des comptes sur le plan affectif, de valoriser les différences et de s’efforcer d’intervenir de façon à ne pas priver de leurs moyens les membres des communautés marginalisées et sous-représentées. Enfin, cela exige que chaque employé suive la suggestion d’Audre Lorde, soit reconnaître la « différence… [comme] lien brut et puissant à partir duquel notre force personnelle est forgée. » Ce faisant, nous prenons des mesures essentielles qui mènent à des changements durables dans leurs sphères d’influence et au-delà.
Tomee Sojourner-Campbell, Consultante en perfectionnement, équité et lutte contre le racisme, Tomee Elizabeth Sojourner-Campbell est directrice générale de Tomee Sojourner Consulting Inc. Elle est titulaire d’un diplôme en hôtellerie et restauration (Collège Algonquin), d’un baccalauréat spécialisé en études interdisciplinaires dirigées (Université Carleton), d’une maîtrise en justice sociale et études sur l’équité (Université Brock), et elle est candidate à la maîtrise en droit à la Osgoode Hall Law School (Université York). Mme Sojourner-Campbell apporte plus de 20 ans d’expérience professionnelle à ses services de consultation et d’apprentissage. Elle s’est spécialisée dans l’assistance à ses clients, sur place et virtuellement, dans les domaines du perfectionnement professionnel, de l’inclusion, des formes intersectionnelles de racisme dirigé contre les Noirs et du développement organisationnel. Son cabinet collabore avec des clients des secteurs privé et public dans les domaines du droit, de l’immobilier, de l’hôtellerie, de la restauration, des sports et du divertissement, ainsi que de la vente au détail.
La Commission ontarienne des droits de la personne a reconnu Mme Sojourner-Campbell comme étant une experte en matière de profilage racial des consommateurs (PRC). Elle est également commentatrice dans des médias nationaux et internationaux en matière de PRC, d’inclusion et de réponses des entreprises au racisme dirigé contre les Noirs. On peut la joindre sur Linkedin, Twitter et par l’entremise de son site tomeesojourner.com.