La Saint-Valentin est une célébration de l’amour et des liens sociaux. Cependant, pour certains, elle peut aussi être synonyme de solitude. Pour les gens célibataires, en deuil ou même en couple, le sentiment d’isolement risque de s’accentuer à la Saint-Valentin. La Dre Reena Kotecha, experte de LifeSpeak, médecin et consultante organisationnelle, nous aide à mieux comprendre les conséquences de la solitude et propose des stratégies pratiques pour tisser des liens significatifs. Elle propose aussi de précieux conseils et des mesures concrètes pour vous aider à cultiver un solide sentiment d’appartenance, peu importe votre situation amoureuse.
Imaginez que vous assistez à une fête. Un réel festin est étalé devant vous, le DJ fait jouer vos chansons préférées, et vous êtes vêtu de votre plus belle tenue. Vous balayez la pièce du regard, mais personne n’est là pour en profiter avec vous, ou pire encore, vous êtes entouré de gens, mais vous peinez à créer des liens avec quiconque.
Quoique je ne vous souhaite pas de vous être déjà trouvé dans la situation susmentionnée, il est fort probable que, tout comme moi, vous ayez déjà éprouvé de la solitude occasionnelle, ou même chronique. Si vous connaissez le sentiment de solitude, vous êtes tout sauf seul. Statista a sondé plus de 23 000 personnes de 16 à 74 ans à l’échelle mondiale pour découvrir qu’environ 33 % des adultes se sentent seuls.
Ainsi, la solitude touche une personne sur trois.
Selon la vision stéréotypée des gens, la solitude touche davantage les personnes plus âgées et plus isolées, tandis que les recherches révèlent que ce n’est pas toujours le cas. Certes, les personnes âgées ne sont pas à l’abri de la solitude et de l’isolement. Après tout, en vieillissant, nous devenons de plus en plus susceptibles de perdre nos liens sociaux, que ce soit en raison de la retraite ou du décès de nos proches. Or, des études démontrent qu’en réalité, ce sont les plus jeunes générations qui signalent le plus de solitude.
Un sondage réalisé par la BBC auprès de 55.000 personnes a montré que 40 % des participants de 16 à 24 ans se sentaient seuls « souvent ou très souvent », comparativement à 27 % des participants de plus de 75 ans. Le taux de solitude plus élevé chez les jeunes était frappant parmi l’ensemble des cultures, des pays et des genres. Ce phénomène a tendance à surprendre, car la majorité des jeunes d’aujourd’hui sont connectés à des centaines, voire des milliers de personnes du monde entier grâce à la technologie et aux médias sociaux. Curieusement, les médias sociaux peuvent cependant renforcer le sentiment de déconnexion et de ne pas être à la hauteur en raison de l’exposition constante à la vie « parfaite » que les autres choisissent de dépeindre sur les médias sociaux. La génération Z n’est pas la seule confrontée à cette comparaison de chaque instant et au syndrome FOMO (la peur de rater quelque chose). En effet, ce phénomène, tout comme la solitude, touche les adultes de tout âge.
La solitude s’explique par diverses raisons multifactorielles. Chez certaines personnes, il s’agit d’un deuil, du divorce, ou d’un sentiment tenace de ne pas être vues, entendues ou comprises au sein de leur famille ou de leur cercle d’amis. Chez d’autres, la solitude s’explique par la transition d’un milieu de travail en personne au télétravail, faisant en sorte qu’elles passent à côté d’activités sociales après le travail ou de conversations autour de la fontaine d’eau. D’autres personnes pourraient être physiquement séparées de leur famille et leurs amis en raison d’un déménagement pour le travail ou l’université.
Peu importe la raison derrière la solitude, les preuves s’accumulent pour indiquer ses sur la santé et le bien-être. Sans surprise, la pandémie de COVID-19 a entraîné davantage de recherches sur le sujet.
Tout d’abord, il importe de noter que la solitude est intimement liée à la stigmatisation et à la honte. Le Dr Vivek Murthy, directeur du Service de santé publique des États-Unis, a dit que « les gens qui se sentent seuls ont souvent honte de l’admettre. Ils croient qu’en parler voudrait dire qu’ils reconnaissent ne pas être aimables ou suffisants sur le plan social. » Hélas, la stigmatisation liée à la solitude fait parfois en sorte que la personne qui en souffre refuse de l’admettre ou de l’accepter, ce qui l’empêche ainsi de prendre des mesures pour y remédier.
Nous savons également que la solitude a une relation bidirectionnelle avec les troubles de santé mentale. En effet, elle peut contribuer aux troubles de santé mentale courants comme la dépression et l’anxiété ou les aggraver, et les troubles de santé mentale peuvent la promouvoir ou l’aggraver à leur tour. Chez les personnes âgées, la solitude peut provoquer un déclin cognitif plus précoce et l’apparition de la maladie d’Alzheimer. Elle présente également des conséquences sur la santé physique. Une méta-analyse menée par Julianne Holt-Lunstad, professeure de psychologie à l’Université Brigham Young, a déterminé que la solitude présente un risque comparable à fumer 15 cigarettes par jour, et est plus prédictive d’un décès précoce que les effets de la pollution de l’air ou l’inactivité physique.
Si les raisons et effets de la solitude sont nombreux, la bonne nouvelle, c’est qu’il existe également de multiples façons de les atténuer.
Pensez à vos années à l’école primaire. Vous aviez des cours à suivre, mais vous passiez vos récréations à jouer avec vos camarades de classe. Vous participiez peut-être à d’autres activités durant la semaine dans le cadre d’un club après l’école ou de rencontres avec des amis ou de fêtes d’anniversaire. Heureusement pour vous, vous n’aviez qu’à vous y présenter et à vous amuser, car les adultes dans votre vie se chargeaient de toute l’organisation et la planification. Maintenant que c’est vous, l’adulte, je me demande combien de temps vous réservez aux activités sociales par jour, par semaine ou par mois. Certes, il faut de l’effort pour planifier la date, l’heure et l’endroit pour jouer au soccer ou au volleyball entre amis, sortir dîner avec votre famille élargie, traverser la ville pour visiter un musée ou une galerie avec votre partenaire ou visiter vos grands-parents. Cependant, planifier des activités sociales vaut l’effort, et sera sans doute source de plaisir alors que vous créez des souvenirs et renforcez les liens avec les personnes qui vous entourent.
Si vous avez déménagé loin de vos proches pour le travail ou les études, ou que vous ne vous êtes jamais senti très proche des gens qui vous entourent, vous pouvez toujours créer des liens avec d’autres personnes en participant à des activités organisées dans votre collectivité. Ces activités sont souvent annoncées à la bibliothèque ou au café local. Bien que les recherches démontrent que les médias sociaux peuvent promouvoir le sentiment de solitude, je crois aussi qu’ils peuvent aussi favoriser les liens. La différence repose sur la façon de l’utiliser. Au lieu de passer des heures à faire défiler les photos filtrées sur Instagram, songez à vous inscrire à des canaux en ligne conçus pour favoriser les liens interpersonnels. Pour ma part, j’ai déjà utilisé Meetup, une plateforme de médias sociaux qui propose une liste d’activités, de rassemblements ou d’événements pour les gens et les communautés ayant des centres d’intérêt, des passe-temps et des professions similaires.
Le bénévolat est un autre excellent moyen de tisser des liens avec des personnes ayant des vues similaires. Redonner à sa communauté par un effort conjoint et significatif s’avère une solution productive pour créer des liens étroits. De nos jours, il existe un besoin de collecte de fonds et de contribution de temps et de talent pour de nombreuses causes, notamment la santé mentale, la pauvreté alimentaire, la violence familiale, les soins aux personnes âgées, le changement climatique, la protection de l’environnement et les droits des animaux. Trouvez une cause qui vous passionne et joignez-vous à un groupe de bénévoles pour y contribuer et rencontrer d’autres personnes qui font de même.
Le sentiment de solitude au travail est un phénomène courant qui s’explique par un nombre de raisons, comme une dynamique d’équipe toxique, des obligations familiales qui vous empêchent de participer à des activités sociales après le travail, le départ de votre meilleur ami au travail ou le télétravail. La solitude au travail est autant un problème professionnel qu’un problème de santé. Elle affecte non seulement la façon dont on se sent, mais aussi le rendement, la motivation et la créativité. Si la solitude se fait sentir pour vous au travail, c’est sans doute aussi le cas pour vos collègues. Envisagez donc de faire le premier pas en invitant un collègue à vous accompagner à la cafétéria pour dîner au lieu de manger seul à votre bureau. Commencez une nouvelle tendance d’actes de bienveillance spontanés au travail en envoyant un message pour souligner les bons coups d’un collègue.
Si vous êtes gestionnaire, favorisez les liens entre employés en consacrant cinq ou dix minutes de chaque rencontre hebdomadaire pour permettre au groupe de discuter de leur vie. Les activités formelles de renforcement de l’esprit d’équipe restent utiles, mais ne négligez pas les occasions de laisser l’équipe se rassembler et discuter, par exemple en tenant un dîner sans ordre du jour. En tant que dirigeant, accueillir les contributions, les idées et les questions des membres de l’équipe et les écouter sans se laisser distraire vous permettra probablement de remarquer un changement dans les liens entre les membres de l’équipe et dans vos liens avec eux. Ce meilleur esprit d’équipe viendra également approfondir le sentiment d’unité et de confiance.
En résumé, si les raisons et les effets de la solitude sont nombreux, la bonne nouvelle, c’est qu’il existe également de multiples façons d’apaiser la solitude, autant chez soi que chez les autres.
À propos de l’auteure, Dre Reena Kotecha, M.D., consultante en organisation et conférencière internationale TEDx
La Dre Reena Kotecha a étudié la médecine et a obtenu un diplôme de recherche en neurosciences et en santé mentale au collège Imperial de Londres. Elle a suivi une formation portant sur l’utilisation thérapeutique de la méditation de pleine conscience au British Mindfulness Institute. Elle s’intéresse tout particulièrement au bien-être au travail, et propose des approches fondées sur des données probantes pour améliorer la santé et le bien-être des employés sur le plan personnel, ainsi que la productivité, le rendement et l’engagement professionnel.